Le 28 février 2020, Dominique Perrault a dévoilé une étude intitulée Parking du futur réalisée en partenariat avec Indigo, leader mondial du stationnement. Cette recherche sur le souterrain et l’épaisseur entend notamment libérer le niveau supérieur de la rue des programmes urbains. Elle a permis d’identifier quatre scénarios dominants.
Chacun d’entre eux a l’ambition de rendre les espaces de parking plus évolutifs et adaptés à leur contexte. Ils fournissent des orientations générales répondant à des typologies de sites et de conditions urbaines particulières.
Scénario 1 : le parking réaménagé
Ce scénario concerne la reconversion de parcs de stationnement souterrains existants, touchés par les évolutions actuelles de la mobilité et situés principalement dans les centres métropolitains historiques et denses. Le principal défi pour la reconversion de cette typologie de parcs concerne les limites qu’ils recèlent en termes de hauteur de plafond, de capacités structurelles et d’accessibilité.
Les stratégies de « groundscaping » déployées concernent les liaisons physiques des espaces souterrains avec la rue, les transports en commun et les bâtiments avoisinants, par des ouvertures et des passages de qualité, situés sous terre ou en surface. Il s’agit également de favoriser l’apport en air et en lumière, par des dispositifs architecturaux tels que des puits de lumière ou canyons d’accès.
La reconversion programmatique de ces bâtiments est multiple et étroitement liée au contexte urbain environnant. L’intégration d’un large éventail de services de mobilité, des véhicules privés à la logistique, pourra y être systématisée. Ils offrent également des opportunités de développement en lien avec les bâtiments voisins en apportant des solutions énergétiques (géothermie…) ou des possibilités d’extensions programmatiques (stockage, théâtre, …).
Scénario 2 : la place épaisse
La Place Épaisse est une typologie de place publique où les équipements intégrés dans le sol libèrent la surface ou permettent de servir une halle de marché polyvalente. Ce scénario est développé en premier lieu pour les centres-villes périphériques et régionaux qui ont besoin de restaurer leur accessibilité aux voitures et d’améliorer leur durabilité, tout en préservant leur tissu urbain.
La place épaisse se distingue par la concentration d’une multiplicité de services dans le sous-sol permettant de limiter au maximum l’empreinte visuelle du projet. Entre aménagement urbain et bâtiment public, l’intervention architecturale est aussi haute qu’elle est profonde. Les services sont intégrés dans le sol afin de laisser l’espace public aussi libre que possible et l’agencement du bâtiment facilite l’adaptabilité pendulaire des programmes qu’il abrite. L’espace réservé au stationnement des clients un jour de marché devient un espace de stockage le reste de la semaine ; le premier niveau est suffisamment haut pour accueillir les camions et les utilitaires ; la consommation énergétique des boutiques est réduite grâce aux les ressources du sol.
La place épaisse offre des équipements fonctionnels et flexibles aussi bien aux consommateurs qu’aux professionnels.
Scénario 3 : l‘avenue épaisse
L’Avenue Épaisse est une infrastructure de voirie multi-niveau, déroulée sous les axes de circulation principaux des métropoles. Ce scénario répond aux conditions et aux besoins des métropoles denses, par une approche de densification stratégique qui consiste à « dérouler » un niveau de rue sous certaines portions des principaux axes de circulations.
Le premier niveau inférieur accueille une variété de services de mobilité tels que la dépose de passagers, la prise en charge de véhicules, la livraison logistique, les liaisons directes avec les transports publics et les bâtiments voisins (commerces, bureaux, équipements culturels, etc.).
L’objectif principal de ce scénario est de libérer le niveau supérieur de la rue des programmes urbains qui n’ont pas besoin d’un accès privilégié à la rue extérieure. Le souterrain devient le lieu par défaut pour la gestion de la mobilité urbaine au sens large. Le positionnement de ces espaces souterrains en ville, leur commodité et leur performance énergétique en font aussi les sites privilégiés d’une multitude d’entreprises liées aux nouvelles économies : “Dark Kitchen”, ateliers, industries légères, production sans-humains (parking pilote, fermes de serveurs, agriculture hors-sol, etc.).
Scénario 4 : le sol épais
Ce scénario consiste à créer un sol épais commun, en dessous et entre les bâtiments, intégrant services et équipements. Il s’inspire de pratiques contemporaines de développement immobiliers. En pratique, les bâtiments se tiennent sur un sol épais fonctionnel qui libère le niveau de la rue, le multiplie et optimise ses usages et sa valeur.
Du point de vue architectural, le « sol épais » est un podium perforé qui remplace le sol habituel de la ville. La création d’un épais territoire commun offre une fonctionnalité et une efficacité accrues grâce à la collectivisation de certains services publics et à l’intégration d’un plus grand nombre de moyens de circulation. C’est une approche architecturale particulièrement durable, au sens où elle ancre de conséquents volumes habitables dans le sol.
Ce scénario repose sur la flexibilité, la fonctionnalité et l’accessibilité. Les dalles forment des espaces continus pour tous types d’accès et facilitent les transformations futures et évolutions programmatiques. L’éventail complet du « groundscaping » devient normalisé, il apporte lumière et air profondément dans le projet, tant pour les espaces accessibles aux véhicules qu’aux piétons. Cela participe également à effacer la séparation entre niveaux inférieurs et supérieurs, si préjudiciable à la qualité de l’espace urbain et à la valorisation des biens immobiliers.