Le Prix Versailles a dévoilé à Paris le 30 septembre sa liste 2024 des plus beaux campus du monde : six bâtiments universitaires récemment ouverts ou rénovés, qui servent à la fois la créativité, l’écho au patrimoine local, la performance écologique, et témoignent d’une empreinte exceptionnelle. Découverte des lauréats, dont un projet français.
« Ces lieux qui servent à la formation des personnes, à l’acquisition et à la transmission des connaissances sont cruciaux dans l’avènement d’une société durable où le sensible rejoint l’intelligence. L’apprentissage du beau dans des campus où s’exprime l’excellence architecturale encourage l’éducation. Il contribue au mieux-être des apprenants et enseignants, représente un gage indéniable de confiance et un appel à l’exigence », souligne Jérôme Gouadain, secrétaire général du Prix Versailles.
SLAC – Université Wenzhou-Kean, Wenzhou, Chine
Fondée en 2014, l’Université de Wenzhou-Kean est une coentreprise entre les universités de Wenzhou et Kean, New Jersey (États-Unis). Le nouveau Centre d’apprentissage et d’activités pour étudiants (SLAC), stratégiquement situé, devient le point de repère central du campus.
L’inscription du bâtiment dans le paysage de montagnes, la gestion de l’eau, sa façade transparente qui laisse en prise avec les éléments, nourrissent une harmonie avec la nature qui se retrouve dans son enceinte, particulièrement baignée de lumière. La conception de la « rue verticale », à l’intérieur, s’inspire également des tracés de rue traditionnels de Wenzhou, créant un espace interactif où les étudiants se déplacent librement entre les étages.
Du grand atrium à la bibliothèque, en passant par les diverses salles d’activités, le site, conçu par l’agence Perkins&Will, conjugue astucieusement les espaces ouverts et dynamiques aux niveaux inférieurs, et les endroits calmes et collaboratifs aux niveaux supérieurs. Cette grande fonctionnalité participe à la cohésion estudiantine.
Université Paris-Saclay – Centre Henri Moissan, Orsay, France
« L’architecture est un concept et une expérience. Une vie des sens. C’est ainsi que l’on fait la ville et la vie », assure Bernard Tschumi. Ici, loin de la ville, au coeur de Paris-Saclay, il faut chercher l’urbanité au sein du nouveau Centre Henri Moissan, du nom du chimiste et pharmacien lauréat du prix Nobel en 1906.
Une « rue » intérieure longue de près d’un kilomètre et ses affluents – la rue de la Recherche et la rue de l’Enseignement – relient une chaîne de six bâtiments accueillant les éléments du programme d’enseignement et de recherches, tous connectés entre eux par des passerelles piétonnes vitrées. En son centre, face à la future gare, un bâtiment-atrium transparent accueille les étudiants, enseignants, et visiteurs dans un monumental espace intérieur rassemblant trois amphithéâtres. Dans tous les espaces, l’emploi de panneaux de bois contraste avec l’usage du verre, de la lumière et des surfaces blanches, et apporte une chaleur visuelle fédératrice.
Ce complexe de 74 000 m², réalisé par Bernard Tschumi et Groupe-6, est l’un des plus vastes projets universitaires de France. Il crée un espace de dialogue entre la biologie, la pharmacie et la chimie, départements qu’il abrite, et les inscrit comme vitrine ambitieuse.
Université d’Édimbourg – Edinburgh Futures Institute, Édimbourg, Royaume-Uni
Au coeur d’un site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, l’Université d’Édimbourg, fondée au XVIe siècle, est l’une des plus anciennes et plus prestigieuses au monde. L’ancienne infirmerie royale, située à proximité, offrait une possibilité d’extension ambitieuse, en dépit de l’état initial du bâtiment. Un formidable projet de construction et de réhabilitation y a vu le jour. Aux commandes de la transformation, Bennetts Associates, pour un ‘Futures Institute’ du XXIe siècle.
La réfection de l’hôpital chirurgical de style « Scottish baronial », soutenue par de nouvelles insertions et ajouts colorés à grande échelle, a considérablement déplacé le centre de gravité de l’université et a créé une nouvelle identité pour l’un des bâtiments historiques les plus admirés d’Édimbourg. À l’intérieur, l’ancien accueille le moderne avec beaucoup de naturel.
Grâce au Futures Institute, une nouvelle place publique relie l’université à la ville, déployant une majestueuse ouverture qui profite au plus grand nombre.
Université de technologie de Nanyang – Gaia, Singapour
La construction en bois massif impose ses propres contraintes. Pour autant, Singapour la ville-jardin à l’architecture audacieuse et l’Université technologique de Nanyang ont donné naissance à Gaia, plus grand bâtiment en bois d’Asie, et ouvrage démonstrateur puisqu’il s’agit d’un centre d’apprentissage, de recherche et d’innovation.
Gaia, le nom de la déesse grecque de la terre, n’est pas usurpé. Les agences Toyō Itō et RSP ont donné à l’ouvrage une courbe quasi sensuelle qui n’est pas sans rappeler celle de la planète, un horizon vertical incurvé de 220 mètres sur six étages offrant des atriums ensoleillés et des zones d’étude en plein air. À l’intérieur, le bois massif reprend ses droits, imposant sa trame impérieuse.
Pour compenser l’usage de cette ressource, Gaia a réduit sa dépendance à l’égard des sources d’énergie non renouvelables. Une inspirante ode environnementale de la part de pionniers du design.
Université Johns Hopkins – Bloomberg Center, Washington D.C., États-Unis
Fondée à Baltimore, Maryland, en 1876, Johns Hopkins fut la première université américaine sur le modèle des institutions européennes. C’est aujourd’hui sur Pennsylvania Avenue, au coeur de Washington, qu’elle a installé le Bloomberg Center au sein d’un bâtiment entièrement rénové de dix étages.
Ce nouvel environnement d’apprentissage est destiné « à relever bon nombre des défis les plus difficiles auxquels la nation et le monde sont confrontés ». C’est-à-dire, exactement entre la Maison-Blanche et le Capitole, apporter intelligence, science et raison.
Ennead Architects, qui avait déjà construit le bâtiment d’origine, se devait pour sa part de relever le défi de cet objectif ambitieux. C’est chose faite avec un ouvrage neuf à tous égards, conçu pour évoquer une « société démocratique ». Un grand atrium central contient des salles diverses apparemment suspendues, brouillant les frontières entre les espaces et invitant à la réflexion.
Université de New York – John A. Paulson Center, New York, États-Unis
À Manhattan, un ouvrage intrigant signé Davis Brody Bond et Kieran Timberlake crée une subtile transition entre les bâtiments existants – les Silver Towers et Washington Square Village – et le paysage urbain varié de Greenwich Village.
Difficile de savoir tout ce qui se cache derrière la façade flamboyante du John A. Paulson Center. C’est pourtant l’un des plus importants programmes mis en oeuvre par l’Université de New York : des équipements sportifs au sous-sol, des salles de classe, divers et nombreux espaces dédiés à l’art et au spectacle, 400 logements dans les étages supérieurs…
Une densité fonctionnelle structurée autour du Commons, un vaste espace ouvert et animé qui encourage les rencontres et les interactions informelles. Cette ouverture renforce les échanges intellectuels, tandis que la physionomie du bâtiment favorise une relation avec le quartier à 360 degrés.