Apparemment, le ministre des architectes ne s’y plaisait guère lors de sa présentation du budget 2012 de son ministère de la Culture et de la Communication en ce mercredi 28 septembre, rue de Valois. L’architecture en tant que telle fut à peine citée, dans le cadre du Grand Paris. Elle était là pourtant, incognito, en soutien au Spectacle vivant et aux Arts plastiques, notamment. Plongée en livre de comptes.
Malgré le temps splendide et l’urbanité des auditeurs, «Dernière question», intima soudain Frédéric Mitterrand à la surprise de son auditoire de journalistes professionnels.
Après l’ennuyeuse lecture d’un communiqué de presse long comme un jour sans pain et des réponses ironiques à quelques questions vite expédiées, la fête était terminée.
Bref, puisqu’il est question de budget, voyons donc.
Nous savons que l’architecture n’est plus qu’une subdivision de l’organigramme du Patrimoine. Depuis quelques années, exit la DAPA, le ‘budget de l’architecture’ n’est plus. Alors, monsieur le ministre des Architectes, comment se passe cette réforme ? C’est bien ? Ce n’est pas bien ? Comment font les hommes de l’art pour y retrouver leurs petits ?
L’architecture, cet art majeur, est partout, aurait pu argumenter le ministre, s’il avait eu le temps.
Ainsi, les travaux annoncés à Paris au Palais de Tokyo (20M€ 2007-2012*) sont à chercher au budget des Arts plastiques. De fait, les 45M€ alloués à la philharmonie de Paris en 2012, signée Jean Nouvel, sont budgétés dans le cadre du ‘Spectacle vivant’.
A propos de ce dernier projet, c’est l’occasion d’apprendre que la part de l’Etat, la moitié en l’occurrence, s’élèvera au final (chiffre 2012) à 158M€. Ce qui fait le coût de l’ouvrage – comme disent les financiers – à 316M€. Ce sont les Parisiens qui financent l’autre moitié.
Zaha Hadid doit rigoler. C’est peu ou prou le budget qu’elle avait annoncé pour son projet avant d’être de fait éjectée, en 2007, du concours de la philharmonie de Paris, le règlement stipulant expressément que tout budget au-dessus de 200M€ serait éliminatoire.
Les services de communication de monsieur le ministre ont-ils informé les citoyens du doublement de cette facture ?
Cela écrit, en 2009, pour ce qui concerne le département des Arts de l’Islam du Louvre, de Rudy Ricciotti, la part de l’Etat était budgétée à 20M€. Deux ans plus tard, selon le ministre, elle atteint désormais 36M€ (2007-2012).
Ailleurs encore, ces crédits de paiement (CP) et autorisation d’engagement (AE) : le MUCEM à Marseille (ouverture en 2013), Rudy Ricciotti encore : 41,3M€ (CP), 19M€ (AE) en 2012 ; le centre des Archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine (92), de Massimiliano Fuksas : 10,7M€ (CP), 22,1M€ (AE) en 2012.
Très bien.
Sauf que ces projets, en cours, sont déjà inscrits, au moins dans les livres de comptes, à la rubrique ‘Patrimoine’ du ministère. Pas construits, déjà au patrimoine.
Tiens, encore, sous l’intitulé ‘Musées’, le Musée de l’histoire de France, voeu présidentiel : 10M€ (CP), 30M€ (AE) pour 2012. Pas conçu, déjà au patrimoine.
L’époque est formidable !
D’ailleurs, pour ceux que ça amuse, elles sont sans doute d’autres références à l’architecture dans les multiples subdivisions du budget 2012 de ce vaste ministère de la Culture et de la Communication.
Toujours est-il, à propos de ce discours, que l’architecture en tant que telle fut à peine évoquée.
Après, d’aucuns s’étonnent que plus personne ne sait ce que c’est.
«Dernière question !»
Christophe Leray
* Parmi ces chiffres, tous issus du communiqué de presse, certains figurent sous le budget 2012, d’autres sous la période 2007- 2012. Des chiffres sont précisés en montant global, d’autres en CP et AE. On voudrait ajouter de la confusion à la confusion qu’on ne s’y prendrait pas autrement.
Cet article est paru en première publication sur Le Courrier de l’Architecte le 5 octobre 2011