Un parcours accidenté qui tourne au toboggan à partir de Montségur, la citadelle du vertige et ses rudes pentes. Suivront les cols de la Croix des Morts et de Saint-Louis (2ème catégorie), atteints via le spectaculaire viaduc de l’Escargot.
Le genre de parcours, entre Aude et Ariège pour une arrivée dans les Pyrénées-Orientales, qui va éparpiller le peloton et peut se révéler piégeuse pour les leaders qui auront à cœur de se marquer à la culotte. Une étape pour un outsider en forme ne visant plus le classement général ? En tout cas, dans le gruppetto, une étape tranquille pour les sprinteurs rescapés des Alpes.
En début de matinée, à Carcassonne, après un, voire plusieurs, Carcassonnais – une pâte à brioche et une crème pâtissière aux fruits confits – au petit-déjeuner, les suiveurs pourront se rendre d’abord aux Archives départementales de l’Aude, un bâtiment signé Pierre Courtade (en association avec les agences toulousaines Vigneu & Zilio, Kombini). Ils ne seront pas déçus.
Inauguré en 2003, le bâtiment met en pratique « pour la première fois dans le cadre d’un programme d’archives, un concept original de conservation à base d’enveloppes protectrices successives imbriquées les unes dans les autres à la façon de poupées gigognes, le tout visant à assurer une régulation thermique et hygrométrique optimale », indique le maître d’ouvrage.
« Le choix des matériaux bruts confère à l’image du bâtiment une honnêteté constructive. La pierre soigneusement assemblée, la vêture de bois du silo précisément calepinée, ou la répétition réglée des grilles d’acier, sont comme un écho au patient travail de compilation qu’implique toute collection d’archives », indique l’architecte.
Les espaces réservés au public ont été conçus pour dégager un sentiment de quiétude et d’intériorité, les suiveurs pourront donc commencer leur journée au frais et dans le calme.
Il ne faudra pas traîner cependant car il va falloir aux suiveurs, tout autant amateurs d’architecture contemporaine que de la petite reine et de sport en général, aujourd’hui quitter la caravane et s’éloigner quelque peu de la route du Tour pour satisfaire leur appétit.
Il s’agit en effet de faire un détour par Pamiers pour aller découvrir le restaurant de l’institut Notre-Dame qui valut à Benjamin Cros et Rémy Leclercq de remporter l’Équerre d’argent 2018 dans la catégorie première œuvre.
Jean-Claude Martinez, le président de la MAF, sponsor de la première œuvre, remarquait à leur propos en leur remettant la récompense que « la première œuvre est le symbole de l’avenir de cette profession, c’est une promesse que les architectes sont indispensables à l’acte de construire ». Benjamin Cros et Rémy Leclercq n’allaient pas le contredire. « La loi MOP reconnaît aux architectes le sérieux de la construction, pourtant, en 2018, la loi ELAN signifie une dégradation de la qualité architecturale », ajoutait alors Jean-Claude Martinez. Qui, encore plus aujourd’hui qu’hier, pour le contredire ?
L’institution Notre-Dame – établissement scolaire privé accueillant des élèves de la maternelle au lycée – avait alors besoin d’un nouveau pôle de restauration d’une capacité de 600 couverts, ce qui n’avait rien d’évident avec un site et un bâtiment tous deux classés, dont l’un des trois clochers de Pamiers, lui-même classé monument historique depuis… 1921.
« Il y avait un véritable enjeu architectural. Nous souhaitions défendre une architecture contemporaine tout en conservant l’aspect historique avec l’emploi de la brique », expliquent les architectes. « Le but était aussi de créer une nouvelle façade sur la rue. Un long mur en brique en claustra qui fait entrer la lumière tout en protégeant les élèves des regards. Et qui la fait ressortir quand il fait nuit », disent-ils.
Le bâtiment comprend les cuisines et trois salles à manger. « Cette première œuvre ne semble pas en être une tant il s’en dégage une incroyable maturité et aménité », a estimé le jury de l’Equerre d’argent 2018. « Le bâtiment, tout en étant en opérant une rupture, raconte une histoire sur sa ville », conclut-il. A voir donc.
Puisqu’il est question de cantine, les suiveurs déjeuneront sur place d’un azinat – potée à partir de légume de saison (comme le chou, de pomme de terre, blette, etc.) et de viande – qui leur tiendra au corps. Le tout arrosé d’hypocras, mais avec modération.
En effet, après le café, poursuivre la visite à Pamiers avec le complexe sportif livré en 2015 par W-Architectures, l’agence fondée en 2002 par Raphaël Voinchet. La singularité du site – une parcelle enclavée entre le centre aquatique, le stade et des habitations, la déclivité du terrain vers l’Ariège – pose des questions essentielles.
« Comment composer, dans une zone urbaine particulièrement hétérogène, un ensemble cohérent avec le bâti voisin ? Comment éviter qu’un bâtiment de cette échelle ne renvoie l’image d’un entrepôt sourd et muet ? Enfin, comment faire de cet équipement un outil performant adapté aux besoins des sportifs mais également exemplaire sur le plan environnemental ? », s’interrogeait l’agence.
L’architecture proposée, à l’écriture résolument contemporaine, répond à ces questions sans ambigüité. « Elle joue son rôle de « passeur » pour rester à l’écoute des lieux et s’attache à faire signe tout en les respectant. Symbole du lien social à tisser chaque jour, elle tente de créer les liaisons nécessaires avec son environnement », concluent les architectes.
Avant de quitter Pamiers, faire le plein de croustade du couserans et de milhassou au potiron, à grignoter dans la voiture le temps de rejoindre Quillan puis en attendant l’arrivée des premiers coureurs et, pour être exhaustif, l’arrivée des derniers, exténués.
Christophe Leray (dans la caravane)
Pour les suiveurs, retrouver :
– Toutes les étapes du Tour de France contemporain 2021.
– Le Tour de France contemporain 2020 : Le départ ; La suite ; La suite de la suite ; L’arrivée.
– Le Tour de France contemporain 2019 : 1ère semaine ; 2ème semaine ; 3ème semaine.
– Le Tour de France contemporain 2018