A l’heure des journées du patrimoine, retour sur l’hôtel du Président Tyndo à Thouars (79), dont la reconversion réalisée par l’agence ARC&SITES est lauréate du Prix national Les Rubans du Patrimoine 2016 pour sa transformation en Conservatoire intercommunal de musique et de danse. Communiqué.
La reconversion en Conservatoire intercommunal de l’hôtel du Président Tyndo, bâtiment du XVe siècle implanté au coeur de la ville de Thouars et désaffecté depuis 30 ans, n’a pas été acquise d’emblée et a fait l’objet d’un âpre débat face à un projet de construction neuve.
Construit à la fin du XVe siècle en bordure de la ville médiévale de Thouars, à l’emplacement d’une ancienne résidence des rois d’Angleterre, l’hôtel du Président Tyndo, transformé en école communale au XIXe siècle, était à l’abandon depuis le départ des élèves en 1979.
La restauration et l’aménagement du site, confiés à l’agence ARC&SITES architectes du patrimoine (mandataire), sont résolument contemporains. L’espace d’accueil du conservatoire est aménagé dans l’ancien préau des élèves. Voûté et ouvert par de grandes arcades vitrées sur le nouveau jardin fleuri, cet espace lumineux est conçu comme une antichambre axée sur le bien-être des élèves et enseignants.
Une porte percée dans le mur médiéval conduit le visiteur dans un escalier conçu comme un lieu de contemplation et de convivialité. Il met en valeur plus de cinq siècles d’architecture. Détaché des murs, cet escalier porté par la cage de l’ascenseur associe l’acier brut et le bois. Deux cheminées mises en scène dans le volume de l’escalier rappellent la fonction de l’ancien logis. L’une d’elle, découverte en phase de diagnostic, présente un exceptionnel décor champêtre du début du XVIIe siècle où des oiseaux virevoltent au-dessus des arbres. Des «coussièges*» aménagés dans l’épaisseur des murs invitent les élèves à contempler les lieux et à lire à la lumière des vitraux clairs.
La paroi de verre et d’acier de l’ascenseur est ajourée d’un «millefleurs», réinterprétation des décors peints des cheminées de l’hôtel, par la designer textile Sarah Dreaper. Restituées dans leurs dispositions anciennes, les deux grandes salles du logis médiéval accueillent la médiathèque, lieu de ressource et de diffusion, et la salle d’éveil musical, où deux cheminées exceptionnelles découvertes à l’occasion du chantier ont été restaurées.
Pour François Goutal, directeur du Conservatoire, «ce choix témoigne de la capacité des architectes à marier enseignement et révélation du patrimoine». L’aile sud du XIXe siècle abrite les salles instrumentales.
Les architectes ont conçu des espaces de travail lumineux et spacieux favorables à l’apprentissage et la créativité. Ils ont écarté d’emblée les solutions de type «boîte dans la boîte», évitant ainsi tout espace confiné ou aveugle. Lieu de diffusion par excellence, la grande salle d’orchestre sous sa magnifique charpente a remplacé l’ancien dortoir du pensionnat.
Plus récente, l’aile sur rue, construite en 1910, accueille désormais deux grandes salles de danse. Aérées et lumineuses, elles s’ouvrent sur le jardin et le paysage verdoyant de Thouars. Le bâtiment intègre sur les étages un bardage isolant en bois ligné de teinte naturelle. Dans le prolongement du bâtiment, les architectes et l’artiste plasticien Simon Boudvin ont créé une tour de bois dans laquelle un escalier s’enroule autour d’un pin douglas de 15 mètres de haut, essence dont est issu le bois du bardage.
L’aménagement de la parcelle en espace public traversant assure un nouveau lien entre ville haute et ville basse. La cour haute de l’hôtel médiéval retrouve son rôle d’espace de représentation ouvert sur la ville.
Le recours à des solutions contemporaines intégrées assure à l’équipement un haut niveau de performance technique et environnementale : renforcement des planchers par connexion bois/béton, doubles fenêtres isolantes, dalles flottantes sur ressorts pour les salles instrumentales, gestion technique centralisée, … L’utilisation de matériaux naturels et durables, et les filières courtes économes en énergie ont également été privilégiées : peinture à l’argile, chaux naturelle, bois non traité, …
Pour François Goutal, Tyndo «n’est pas seulement une restauration exemplaire, mais un lieu performant qui incarne la vision culturelle d’un territoire». «Des conditions optimales et un cadre magistral» pour ses 800 élèves, selon Bernard Paineau, le Président de la Communauté de communes du Thouarsais.
«Le nouveau conservatoire conjugue mise en valeur du patrimoine et interventions contemporaines. La mise en œuvre de solutions techniques spécifiques, respectueuses du patrimoine, a permis d’atteindre des performances acoustiques, thermiques et structurelles élevées dans le cadre d’un budget très contraint. C’est aussi la création artistique autour du projet qui suscite l’intérêt des visiteurs», conclu. Rémi Desalbres, architecte de l’agence ARC&Sites.
* Un coussiège (du latin culcita, « coussin » et sedes, « siège ») est un banc ménagé dans l’embrasure d’une fenêtre par un ressaut de la baie. Forme courante dans les constructions médiévales, il est souvent en pierre, intégré à la maçonnerie, revêtu de bois, de coussins. Wiki.