Décryptage avec Jérôme Netter, Directeur d’Opalia, d’un modèle de contractualisation qui, dans le cadre de la construction d’équipements nécessaires, peut se révéler vertueux.
Pour les architectes, comme pour la population générale, le mot de concession renvoie quasi automatiquement aux concessions autoroutières mais, comme il s’agit d’architectes, le mot évoque pour eux presque aussi vite les Partenariats-Public-Privé (PPP) ou les plus récents marchés globaux de performance (MGP) en lesquels ils n’ont guère confiance. La concession ne fait pas rêver.
Jérôme Netter – Non et cela fait un peu partie de mes chevaux de bataille. J’explique que la concession et le MGP n’ont rien à voir. En fait, avec le MGP, le groupe constructeur et mainteneur construit pour construire en oubliant ce pour quoi l’équipement est construit. Si Opalia construit une piscine, ce n’est pas pour bâtir un objet étonnant et entretenir des machines, c’est pour accueillir des nageurs et des baigneurs qui sont donc au centre du système. Le concessionnaire, qui doit gérer la piscine dans le temps long, doit construire un ouvrage qui va lui permettre de le gérer au mieux et d’accueillir au mieux tous les publics lesquels à l’arrivée sont les bénéficiaires de l’équipement et de ses aménités.
Pour autant, la concession a un problème d’image, ne serait-ce qu’avec ces concessions d’autoroute qui ont mauvaise presse. Il y a en réalité toutes sortes de délégations de service public (DSP) ce d’autant plus que depuis une loi européenne datant de 2016, il faut faire la distinction entre les concessions de services et les concessions de travaux. Les marchés de bouche parisiens par exemple sont des concessions. D’où la difficulté de mettre en exergue les bonnes pratiques de la concession, du moins dans notre cas pour la construction de piscines et d’équipements.
Peut-on parler de méfiance des architectes ?
Peut-être que l’une des origines de la méfiance des architectes vis-à-vis de la concession est qu’ils craignent d’être bridés dans leur création, des opérations en PPP leur ont laissé un mauvais souvenir parce que manifestement ils ont fini par coûter plus cher qu’annoncé et qu’il y a eu quelques scandales. Il est vrai que les PPP n’ont pas complètement fonctionné comme souhaité qu’ils fonctionnent. Mais je crois que ce qui gêne vraiment les architectes aujourd’hui est la conception-réalisation puisque c’est l’entreprise et donc le privé qui devient maître de l’architecture censée être d’intérêt général. Pour autant, nombre d’agences travaillent avec des maîtres d’ouvrage privés, c’est toute l’ambiguïté. C’est la raison pour laquelle nous devons réfléchir ensemble et trouver le moyen de passer le message qu’il y a d’autres façons de faire, dont la concession. De l’importance de promouvoir les bonnes pratiques.
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Peut-on comparer la concession à une sorte de bail emphytéotique ?
La comparaison est peut-être possible entre les baux emphytéotiques hospitaliers et la concession en ce sens qu’il s’agit d’un service public avec des recettes issues de la collectivité. Le concessionnaire en ce cas ne fait qu’exploiter le service et récupère les recettes. Ensuite, soit il verse quelque chose à la ville soit c’est la collectivité qui lui verse quelque chose selon que l’exploitation est bénéficiaire où déficitaire et selon les contrats signés. C’est un fonctionnement assez proche de la concession d’autoroute, ce sont les mêmes mécanismes sinon que c’est l’État qui délègue aux sociétés autoroutières et que ce sont des collectivités locales qui délèguent pour une piscine. Mais les architectes sont assez peu impactés par les concessions d’autoroute mais sont plus concernés dans le cadre d’une concession pour une piscine car il y a un équipement à construire.
D’ailleurs, les architectes avec qui j’ai travaillé m’ont indiqué préférer la concession au MGP, notamment, parce qu’effectivement le concessionnaire à une vision durable des choses, à 25 ans, qu’il n’y a qu’un interlocuteur..
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Le principe de la concession peut-il fonctionner avec d’autres types d’équipements publics que la piscine ? Un gymnase, un musée pourraient-ils être construits en concession ? Après tout il y a des musées gérés en DSP mais aucun à ma connaissance ayant été construit en concession ; c’est pourtant bien un service public, il y a des recettes, comme pour une piscine.
En l’occurrence la difficulté n’est pas tant de trouver un architecte pour construire le musée mais de posséder la capacité à le gérer et l’exploiter. Tout dépendrait donc du profil du concessionnaire. Concessionnaire n’est pas un métier en soi, on est concessionnaire dans un métier. Opalia s’appuie sur une longue histoire et sur la compétence de Suez Eau France dans la gestion des contrats longs et celle de Vert Marine dans la gestion des centres aquatiques. C’est pourquoi nous nous sommes lancés dans la concession d’équipements comme les piscines. Certains groupes de BTP sont concessionnaires d’autoroutes ou de parking parce que cela reste des travaux publics et donc leur cœur de métier.
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Concernant les piscines, dont les besoins sont immenses à l’échelle du pays, la concession serait-elle un nouvel exemple de la nature ayant horreur du vide : les communes, recevant de moins en moins d’argent de l’État, sont paupérisées mais comme les besoins demeurent, la concession apparaissant dans ce cadre comme une solution de pis-aller ?
En l’occurrence, certains services publics sont structurellement déficitaires, ce qui est le cas des piscines. Nous pensons qu’en donnant la gestion d’un tel équipement d’une grande technicité à des professionnels, l’ouvrage va perdre moins d’argent que si la collectivité doit le gérer elle-même. De plus nous avons une marge, financière, technique, que la ville n’a pas et qui garantit une grande réactivité dans la maintenance de l’ouvrage. Quelque part, la ville s’achète surtout une assurance car elle garantit son déficit, elle sait que le budget ne va pas déraper parce que, de toute façon, s’il dérape, le coût est pour le concessionnaire ou le délégataire qui va devoir assumer le dérapage.
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Puisqu’il s’agit d’argent public, les villes ont des capacités d’emprunt préférentielles, pourquoi ne financeraient-elles pas elles-mêmes leur piscine ? Le risque perçu est que l’équipement coûte trois fois plus cher à la fin.
Non, pas trois fois, ni deux fois. Certes, c’est un peu plus cher, c’est possible. Quand la ville emprunte, elle doit commencer à rembourser avant même le début des travaux et, l’ouvrage construit, elle va devoir gérer et payer l’exploitation. Opalia en revanche emprunte sur la totalité de la durée de la concession et nous avons des taux d’intérêt qui sont relativement comparables à ceux des collectivités. Alors peut-être est-ce finalement 25 ans plus tard un peu plus cher mais encore une fois c’est le prix de l’assurance.
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Ceux, architectes et maîtres d’ouvrage qui l’ont déjà expérimenté s’en félicitent. Pourtant, la grande majorité des autres ne sait même pas que la conception existe, tout du moins déclinée ainsi. Est-ce parce que justement, à part la piscine, il n’y a peut-être pas tant d’opportunités pour un tel mode de contractualisation ?
Comme je l’ai évoqué, il faut réfléchir. Les patinoires s’y prêtent aussi… Et les musées peut-être maintenant que j’y pense (rires). Autre exemple, la grotte Cosquer à Marseille a été réalisée dans le cadre d’une concession de 25 ans, incluant la réalisation de l’ouvrage et son exploitation. C’est le concessionnaire qui, au-delà de la construction du répliqua, propose une offre culturelle comme socle de développement de ce nouvel équipement.
Le concessionnaire construit et s’occupe de tout mais dans quel état sera rendu le bâtiment au bout des 25 ans ?
À part l’usure normale d’un bâtiment au bout de 25 ans, il sera rendu parfaitement entretenu et en parfait état de fonctionnement car le concessionnaire a besoin que les gens pratiquent son équipement jusqu’au dernier jour ou c’est lui qui ne gagne plus d’argent. L’entreprise qui construit, même en MGP, est partie au bout de 6 ou 7 ans, ce n’est pas son problème ce qui se passera vingt ans plus tard. Avec Opalia, nous sommes là jusqu’au dernier jour.
Je renvoie à la notion de métier : Opalia construit la piscine mais n’est pas un constructeur, Opalia finance l’ouvrage mais n’est pas une institution financière et ne s’enrichit pas sur le financement, Opalia maintient et s’occupe de l’ouvrage mais ce n’est pas une entreprise du bâtiment ou de maintenance. Le concessionnaire est non seulement un interlocuteur unique mais c’est un interlocuteur sachant, en prise directe avec la globalité des enjeux et l’expérience d’un tel ouvrage dans le temps, c’est ce que signifie mettre le nageur au cœur du système car le métier d’Opalia est de s’occuper du nageur.
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Opalia, un agrégateur de talent au service de votre centre aquatique
Opalia est né en 2009 de la volonté de Suez Eau et de Vert Marine de s’associer pour créer une société dédiée aux projets en concession dans le domaine des équipements de sports et de loisirs, plus particulièrement dans celui des piscines et des centres aquatiques.
À partir des besoins définis par la collectivité, la mise en œuvre d’un concept enrichi par l’expérience du partenaire permet de garantir les choix techniques et stratégiques qui vont conditionner le projet architectural et la réussite de l’exploitation. Le financement piloté par Opalia, spécialiste de la concession, permet d’identifier les risques et de sécuriser au mieux le coût global de l’ouvrage.
Le service public est assuré en étroite collaboration avec la collectivité qui en définit le cadre et son évolution. À chaque étape, l‘engagement d’Opalia et son savoir-faire permettent d’optimiser la performance de l’équipement en termes de gestion et d’animation sur toute la durée du contrat.
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Jérôme Netter
Directeur
OPALIA
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