Comme le note Christian Prud’homme, le patron du Tour, après la traversée du Gers et du Tarn-et-Garonne, la visite dans le Lot est aussi un clin d’œil à la séquence d’ouverture du Tour : le château de Cayx, situé à proximité, appartient à la famille royale du Danemark. Cette étape de 189 km est normalement le bon moment pour les sprinteurs survivants de la montagne d’une dernière chance avant les Champs-Elysées. Hélas pour eux, ils sont encore si nombreux à n’avoir encore rien gagné que la victoire d’étape sera disputée du début à la fin.
Pour cette étape rythmée donc, les suiveurs commenceront leur journée à la fraîche en filant droit jusqu’à Montauban, pour s’intéresser à une œuvre de jeunesse de l’agence W-Architectures.
L’agence toulousaine a en effet livré en 2008 les réserves et archives du musée Ingres, « comme un coffre solidement clos destiné à abriter des œuvres précieuses, comme une châsse reliquaire dont les ors symbolisent l’importance du contenu, le bâtiment, à la volumétrie nécessairement calme, reçoit une vêture finement décorée », expliquent les architectes.
L’ouvrage est constitué de panneaux de verre et de béton dont le motif gravé et moulé est la trace d’un dessin d’Ingres revisité. Le rythme, donné par l’alternance des éléments de béton mat et des éléments de verre reflétant le végétal, confère à la façade vibration et profondeur.
« Cette impression de profondeur est renforcée par le soulèvement du sol : à l’est, le bâtiment est comme fiché dans le terrain alors qu’à l’angle ouest, le sol se dérobe et la boîte « tend à se suspendre ». Ce mouvement vers l’entrée piétonne principale du parc trouve son point d’orgue dans les trois éléments dorés marquant l’angle nord-ouest du bâtiment. La nuit, un éclairage placé dans la vêture recompose la façade en un nouveau dessin, la boîte inverse son rapport au parc en restituant sa lumière sur le végétal », soulignent les architectes.
Avant de reprendre la route vers Cahors à la rencontre tardive des coureurs, s’offrir une part de montalbane, un gâteau de fruits confits à mi-chemin entre le quatre-quarts et la brioche aux arômes de fleur d’oranger, de vanille et de rhum. Il s’agira aussi de ne pas oublier de ramener dans ses bagages pour la famille et les amis l’une des friandises et spécialités des artisans de la cité d’Ingres : des dragées aux amandes de la maison des Peccou, véritable institution montalbanaise. C’est en 1880 qu’Ernest Peccou a lancé sa confiserie. Cinq générations se sont succédé et le petit confiseur a grossi en devenant le spécialiste en France de la dragée amande. Huit tonnes par jour sont fabriquées, ça en fait des mariages !
Les suiveurs du Tour de France contemporain de Chroniques seront ainsi heureux de rejoindre la vieille ville de Cahors avant le déjeuner en s’arrêtant devant le CHAI pour centre d’hébergement et d’accueil international, livré par Antonio Virga en 2017
Le CHAI est un bâtiment élaboré par l’agence parisienne selon un double objectif : promouvoir la cohésion de la communauté en offrant un bâtiment aisément appropriable, à l’échelle des usagers et assurer l’ouverture de cet édifice sur le contexte plus large de la ville de Cahors, son histoire et son paysage. L’approche adoptée permet le débordement de l’aménagement vers les espaces adjacents, qu’il s’agisse de la future zone récréative, des espaces civiques et commerciaux bordant les berges, ou du quartier résidentiel vert à venir.
Le volume simple et minéral du CHAI se détache du sol, laissant sa façade se plier au niveau de la rue pour accompagner ce trait d’union. La façade au sol se plie et devient une accroche à la balade pédestre du « Trait d’Union » qui relie la Plaine du Pal au centre historique. La transparence du rez-de-chaussée permet de faire pénétrer l’espace public dans le hall, qui devient un véritable espace d’accueil. Ce dernier embrasse l’un des multiples jardins secrets qui ponctuent la ville de Cahors. Depuis la rue, ce cœur vert est un prétexte, une invitation à entrer pour offrir à ses usagés un moment de sérénité, à l’image de ces cloîtres répandus dans le Lot.
Au dernier étage, le restaurant naît de l’ouverture symbolique du jardin sur le Pont Valentré, son angle et son pli élargissent le cadrage et la vue. La terrasse et le restaurant, par leur implantation, profitent autant du jardin secret que du territoire du Lot.
C’est également dans le centre historique de la préfecture du Lot que le même architecte a livré deux ans plus tard « Le grand palais », un cinéma de sept salles, doté d’un espace muséologique indépendant de 3 653 m².
La place, globalement minérale, présente, au centre, un espace végétalisé très dense, nommé « l’oasis ». Au dernier niveau du bâtiment, avec une entrée distincte du cinéma, se trouve un espace où sera localisé le musée de la Résistance (qui utilisait précédemment un bâtiment sur la place démoli avant le chantier). Sur cet ancien site militaire (aujourd’hui place Bessières), le projet a permis de récréer et réinterpréter la symétrie de la caserne préexistante en occupant la place de l’aile est du complexe, détruite lors d’un incendie en 1943.
Le jeu d’alignement du projet respecte une logique stricte : les deux bâtiments préexistants de la caserne sont des points de repère. Dans la recherche d’une esthétique contemporaine forte, l’architecture du cinéma vise à dépasser les objectifs de reconstitution de la morphologie de l’ancienne caserne, demandée par le maître d’ouvrage.
Le bâti se décompose en deux volumes distincts, créés méthodiquement puis affirmés visuellement : l’un en brique et l’autre en métal doré perforé, chacun jouant un rôle bien précis par rapport à l’espace public.
Le volume en brique, miroir des deux bâtiments de l’ancienne caserne est imaginé comme une réinterprétation contemporaine et identifiable des existants. Il s’agit de l’élément le plus remarquable sur la place, par la liaison directe qu’il propose avec l’histoire de la ville. Le choix de la brique est motivé par la volonté de toucher la mémoire collective des cadurciens, en évitant tout pastiche.
Le gabarit de ce volume et sa présence sont renforcés par le caractère unique du revêtement des façades et de la toiture. Révélant des façades imposantes et fortes, ce volume monolithique est allégé aux étages par un moucharabieh composé de petites perforations qui permet d’apporter de la légèreté à la façade et de créer un appel plus lointain dans son environnement.
Le programme se poursuit dans le volume doré, imaginé comme une extension du volume en brique. Le contraste visuel avec la brique donne en effet l’impression d’un second bâtiment adossé au premier. L’accord chromatique entre la brique claire et le métal doré rappelle les nuances du centre historique de Cahors. Dans un respect de l’histoire architecturale de la ville, ce volume métallique présente une toiture en pente sur le pignon donnant sur la rue.
Le terroir du Quercy, généreux et ensoleillé donne sans doute les meilleurs melons du sud-ouest. Les suiveurs en dégusteront en salade au déjeuner, pour un peu de fraîcheur. Pour les aficionados de la touche sucrée, une part de tarte aux noix et c’est reparti !
Il ne faudra pas aller bien loin pour localiser les jeux de pleins et de vides des volumes du siège social de la Fédération Départementale d’Energies (FDEL) du Lot, livré en 2018 par l’Atelier d’architecture Franck Martinez
Au bord d’un petit bras de rivière, face à la presqu’île du stade de Cahors, les nouveaux bureaux de la FDEL occupent une ancienne parcelle maraîchère. Ce terrain en zone inondable a amené l’atelier d’architecture Franck Martinez à surélever cet ouvrage de 600 m². Il a imaginé un volume tout en longueur, lié à une ancienne bâtisse du XVIIIe siècle soigneusement conservée et réhabilitée.
Le bâtiment s’oriente vers une typologie rationnelle d’immeuble de bureaux. Son enveloppe est rythmée par une trame régulière, alternant éléments en béton (3,20 m) et 50 ensembles menuisés composés en aluminium. La composition dynamique des pleins et des vides contraste avec la bâtisse existante et son ordonnancement régulier percé de 20 menuiseries. Des claires-voies métalliques fixes ou des stores motorisés selon l’exposition protègent du soleil.
La finesse des profilés et la couleur Gris soie des différents éléments, qui se rapproche de celle du béton, permettent aux ouvertures de s’effacer totalement en façade. Cet effet ton sur ton fait changer d’aspect le bâtiment selon les vues extérieures. En portant un regard depuis les côtés, l’enveloppe semble lisse alors que de face les percements sont bien visibles. Reconnaissable aisément depuis la rue, l’ouvrage crée une image forte pour la Fédération.
A Cahors, en attendant la caravane, les suiveurs s’arrêteront enfin au centre universitaire Maurice Faure dont la réhabilitation est l’œuvre de l’agence OECO architectes en 2017
Le projet de réhabilitation du Centre Universitaire de Cahors a permis de transformer une ancienne école normale de filles datant de 1887 en un équipement mixte ouvert sur la ville et répondant aux nouveaux enjeux de l’enseignement supérieur.
L’agence OECO Architectes a évidé partiellement le bâtiment de 4 000 m² pour valoriser sa composition originelle et l’adapter aux nouveaux usages de l’ESPE, de l’Université de Toulouse – Histoire de l’Art et Archéologie, et du Centre de Ressources Canopée. Le plancher bois a ainsi été remplacé par un sol en béton, et des fenêtres et portes en aluminium se sont substituées à celles en bois. Ces dernières apportent un esprit contemporain tout en s’inspirant des tracés régulateurs historiques du lieu. L’aluminium noir des menuiseries, le bois des plafonds, le béton nu et la pierre des murs sont des matériaux bruts qui offrent une cohérence au projet.
OECO Architectes a créé une galerie de verre ouverte sur la Cour Jardin à l’ouest en rez-de-chaussée. Le mur-rideau s’étend sur 30 m. Leurs montants discrets se dissimulent derrière les poteaux ou les brise-soleil en acier, qui apportent de la verticalité au projet.
Seule extension contemporaine de ce programme en forme de H, la galerie constitue le trait d’union entre la cour jardin et la cour d’honneur. Elle ouvre les salles partagées sur le dehors et maximise la fluidité des parcours.
Le parvis en bois surélevé créé à la place de l’ancien parking reconnecte le bâtiment avec l’extérieur et redonne à l’ancienne cour d’honneur toute sa grandeur.
En attendant l’arrivée des coureurs exténués par cette dernière longue étape de presque 190 km, les suiveurs ne pourront que se féliciter de tant d’architecture contemporaine remarquable en pays quercinois.
Une fois les classements établis et les papiers envoyés dans les rédactions, les suiveurs pourront boucler leur journée attablés à l’heure de l’apéro autour d’un plateau de fromages constitué de tomme de vache pour les amateurs de pâte dure et de cabécou d’autan pour les adorateurs de chèvres, le tout arrosé d’un verre de vin de Cahors qui rend hommage aux cépages de Malbec du terroir.
Alice Delaleu (dans la caravane)
Pour les suiveurs, retrouver :
– Toutes les étapes du Tour de France contemporain 2022
– Toutes les Reconnaissances d’étape du Tour de France contemporain 2022
– Toutes les étapes du Tour de France contemporain 2021.
– Le Tour de France contemporain 2020 : Le départ ; La suite ; La suite de la suite ; L’arrivée.
– Le Tour de France contemporain 2019 : 1ère semaine ; 2ème semaine ; 3ème semaine.
– Le Tour de France contemporain 2018