Le Concours Acier donne aux candidats l’opportunité de découvrir et explorer les possibilités architecturales et les techniques de l’acier en concevant un ouvrage avec ce matériau. Le thème de cette édition était : «imaginer et concevoir une structure d’accueil en deux temps, trois mouvements capable de répondre à un besoin d’usage temporaire et qui, par sa flexibilité, à vocation à s’inscrire dans la pérennité». Découverte des projets lauréats 2019.
Concours Acier – Premier prix
Detroit.maj
Julien Desbat, Julien Picard, ENSA Nantes
Détroit, Michigan, récit d’une ville passée de Motors City à Murder City. Au début du XXe siècle, la ville s’est construite autour de l’industrie automobile. Cette croissance rapide a conduit à une urbanisation guidée par les infrastructures automobiles.
Cette dynamique s’est inversée à partir des années 50. Détroit sombre alors et passe de ville fleuron de l’automobile à ville sinistrée. L’apogée de cette crise a lieu en 2013, lorsque la ville se déclare en faillite. Le paysage de Détroit s’est alors transformé et a laissé place à une esthétique du vide. Détroit est devenue surdimensionnée et inadaptée à ses nouveaux besoins.
Aujourd’hui et depuis quelques années, la ville connaît un second souffle. Des initiatives privées souhaitant redorer l’image de la ville ont cependant favorisé la gentrification du centre-ville et accentué la fracture avec sa périphérie. En parallèle, des initiatives citoyennes se sont organisées autour de l’agriculture urbaine. Cette ambivalence pourrait être source d’une nouvelle forme d’urbanité pour la ville, où gratte-ciel et fermes urbaines pourraient cohabiter.
C’est dans ce contexte particulier que s’inscrit Detroit.maj qui va dans le sens d’une réduction de la frontière entre un centre-ville qui connaît une nouvelle dynamique et une périphérie démunie de tout service public et commerce. Ce projet part du constat d’un isolement physique et social des périphéries de Détroit non desservies par l’unique transport public de la ville cantonné au Downtown.
Detroit.maj propose la création d’une nouvelle infrastructure de transport implantée sur Woodward avenue, l’une des principales artères de la ville. Ce nouvel équipement réinterroge, d’une part, la place de la voiture en ville. D’autre part, il remet en question le rôle de l’infrastructure, qui pourrait devenir architecture, pensée comme un potentiel plutôt qu’une frontière. Un prétexte pour recréer du lien physique et social entre les différents quartiers de Détroit.
Concours Acier – Deuxième prix
OTNI «objet terrestre non identifié»
Tom Paturel, ENSA Nantes
Depuis longtemps la ville de Nantes se demande ce que pourrait devenir cet ancien site ferroviaire situé à l’extrémité de son île et du quartier de la création. Face aux édifices, qui chaque jour l’enserrent un peu plus, il s’affirme comme une respiration nécessaire. Aujourd’hui l’une des propositions est d’en faire un véritable parc urbain.
Le projet OTNI, «objet terrestre non identifié», s’inscrit dans cette intention programmatique. Il s’intéresse à cette mémoire du rail qui estampille l’espace et lui donne sa singularité. Il choisit d’abord de réinvestir un ancien hangar présent sur le site, mais ô combien délaissé, afin de lui insuffler un nouveau dynamisme. Il devient un atelier métallurgique dédié à la production de microarchitectures.
Utilisant le rail, cette collection de petits édifices va progressivement habiter et faire vivre le nouveau parc. Cette grande prairie désormais pleinement laissée aux promeneurs va alors abriter une expérimentation, celle d’OTNI. Véritable couteau suisse architectural, OTNI est une architecture circulaire caractérisée par sa reprogrammation permanente. L’édifice est un non programme qui se redéfinit à mesure que les besoins se créent autour de lui. Il s‘adapte aux préoccupations et aux attentes changeantes d’un morceau de ville en restructuration permanente.
Dans sa forme première, il abritera une crèche ainsi qu’une garderie afin de répondre à une urbanisation accélérée du secteur et à son occupation prochaine. Plus tard, qui sait, il peut devenir une guinguette, un centre d’art, une école, un centre sportif, un observatoire. Les modules qui composent OTNI pourront se détacher de sa structure afin d’être remplacés. Chaque entité sera produite par l’atelier métallurgique en fonction du besoin présent et sera libre de déambuler, par le rail, dans le parc ou de s’accrocher à cet objet circulaire qui y trône. OTNI pourra alors porter un ou quinze programmes différents et sera la pièce centrale d’un jeu de vases communicants.
Concours Acier – Troisième prix ex-aequo
Tout-en-un
Thomas Schwindenhammer, Fabien Burgeat, Yousra, El Abassi, Mathieu These, ENSA Marne-la-Vallée
A l’aube des Jeux Olympiques de 2024, la région parisienne est vouée à centraliser un nombre important d’infrastructures dédiées à l’événement. Cela induit des reconfigurations programmatiques des espaces urbains. Souvent, ces aménagements sont conçus pour accueillir un pic de fréquentation mais peinent à rester rentables une fois l’événement terminé. Il s’agit donc de proposer une vision sur le long terme, et de concevoir un bâtiment flexible, réversible, évolutif : un volume abritant un complexe sportif mais ayant le potentiel d’accueillir d’autres programmes au service de la communauté.
Le périmètre autour de l’île Saint-Denis est un lieu stratégique pour la construction du village olympique et de sites d’entraînement, grâce à sa proximité avec les jeux aquatiques et le Stade de France. Cette opération urbaine de 50 hectares autour de la Seine envisage la destruction d’une partie des locaux de l’Institut Supérieur de Mécanique de Paris (SupMéca), notamment du réfectoire et d’une centaine de logements étudiants. Malgré cela, la direction prévoit de doubler le nombre d’étudiants d’ici vingt ans.
On comprend alors que la construction du village olympique met à mal la pérennité de SupMéca. S’appuyant sur l’importante fréquentation du site, son accessibilité et son emplacement privilégié au bord de la Seine, le projet d’une emprise de 550m² s’implante dans l’alignement de SupMéca. La parcelle est occupée de manière à permettre la construction d’autres édifices.
Le bâtiment a l’ambition de proposer un complexe dédié à l’escalade sportive, une discipline ayant le statut de sport invité aux Jeux Olympiques. Le bâtiment contient aussi un espace dédié aux médias, au dernier étage face à la Seine. Des gradins amovibles permettront au projet d’accueillir 700 spectateurs. A terme, ce bâtiment pourra s’adapter aux besoins de SupMéca en accueillant des logements et des lieux dédiés à la vie et l’apprentissage des étudiants.
Troisième prix ex-aequo
SCALES
Sarah Zwahlen, Adrien Simon, Hiba El Ghali, ENSA Nancy
Dans un contexte de dérèglement climatique, avec une augmentation des sinistres dus à l’eau (inondations, montées des eaux, tempêtes), il est essentiel de construire en prenant en compte ces nouvelles contraintes. Le bidonville de Makoko, un bidonville de la ville de Lagos, installé sur l’eau abrite 150 000 habitants et est régulièrement sujet à des destructions dues aux importantes intempéries. Le but est de développer un système d’architecture flexible répondant aux enjeux climatiques, tant à court qu’à long terme.
Le premier élément du module est la barge flottante. Elle est construite sur place à base de bidons de stockage en acier récupéré dans les débris des différentes destructions. Vient ensuite l’ossature : une structure en accordéon constituée de portiques de tôle d’acier pliée. Ceux-ci prennent la forme de profilés en U. Les chevrons permettant de faire la charpente de la toiture sont réalisés également en profilés en U. Ils sont articulés afin de pouvoir pivoter et créer une ossature de plancher.
De cette manière, il est ensuite possible de superposer un deuxième module sur la structure initiale.
Le couvrement est réalisé avec des cadres acier sur lesquels est soudé un grillage fin. Il sert de support pour venir fixer les écailles de couvrement réalisées sur site grâce aux plaques métalliques trouvées à proximité. Il s’agit une nouvelle fois de pouvoir valoriser la filière locale.
Les modules s’agenceront entre eux et seront fixés les uns aux autres afin qu’ils puissent se stabiliser. Ces différents modules créeront une digue de protection en bordure du bidonville afin de briser les vagues. Ils peuvent accueillir du logement, mais aussi d’autres types de programmes tels des commerces, des services…